L'Étoile Flamboyante, une voie géométrique vers le Nombre d’Or

Omniprésente dans l’imagerie maçonnique (en tout cas depuis 1737), l’Étoile Flamboyante désigne une Étoile à Cinq Branches (ou pentagramme), généralement ornée de la lettre G en son centre, et parfois entourée de rayons de Lumière. Particulièrement associée au grade de Compagnon, on la voit figurer sur de nombreux objets et accessoires maçonniques, tels que le Tapis de Loge et le Tablier maçonnique du deuxième grade.

Souvent décrite comme un symbole de l’intelligence créatrice, du Génie humain, l’Étoile Flamboyante a été diversement interprétée. Pour certains, la lettre G placée en son centre est la lettre initiale de God, Dieu en anglais, et certains la remplacent par la lettre hébraïque Yod, première lettre du Tétragramme divin; pour d’autres c’est la Gnose, c’est-à-dire à la Connaissance; pour d’autres encore, cette lettre désigne la Géométrie, dont les rituels affirment qu’elle est "la Science la plus utiles aux Maçons".

Ces interprétations ne s’excluent pas, mais l’affirmation que la lettre G désigne la Géométrie nous semble à plus d’un égard la plus pertinente. Et la plus inclusive également, car elle englobe Dieu (le Grand Architecte de l’Univers, qualifié de Grand Géomètre de l’Univers dans certains rituels de Compagnon) et la Gnose, ou connaissance. 

 

En effet, indépendamment de toute question strictement maçonnique, le pentagramme présente des caractéristiques géométriques des plus intéressantes, et ce n’est pas par hasard si Pythagore l’avait choisi comme signe distinctif de son École. Si le pentagramme ne semble pas (du moins en apparence) avoir joué de rôle théorique particulier chez les Bâtisseurs médiévaux, c’est sans doute parce que les secrets de métier étaient bien gardés. On est même en droit de penser que l’enseignement du pentagramme était certainement l’un des secrets les plus importants des Bâtisseurs, car il appartient pleinement à ce que l’on nomme l’Art du Trait, c’est-à-dire la technique des tracés géométriques à l’aide de la Règle et du Compas, sans référence à des données mathématiques chiffrées. L’Étoile Flamboyante peut aisément se tracer uniquement avec ces deux outils et certaines Loges enseignent encore ce Tracé à leurs Compagnons.

Mais qu’a donc de particulier ce Tracé de l’Étoile Flamboyante? Il permet de trouver très facilement le Nombre d’Or, par la simple voie géométrique, sans utiliser la voie mathématique, et même sans connaître la valeur de Phi, qui est la formalisation mathématique de la proportion dorée (1,6180339087, généralement arrondi à 1,618).

Au XIXe puis au XXe siècles, un véritable engouement s’est développé autour du Nombre d’Or dans les milieux ésotériques et maçonniques, comme en témoigne par exemple le fameux livre de Matila Ghyka intitulé "Le Nombre d’Or, Rites et rythmes pythagoriciens dans le développement de la pensée occidentale" (1931), véritable Bible de la géométrie sacrée pour certains ésotéristes. Le Nombre d’Or permettait de tout expliquer et de montrer l’immense savoir des Anciens. 

Mais certains contestent que le Nombre d’Or ait été utilisé avant sa définition mathématique, qui ne remonterait guère qu’à la Renaissance : s’il apparaît dans certaines structures architecturales telles que la Pyramide de Chéops, ce serait plus le fait du hasard que d’une intention délibérée. Nous ne partagerons pas forcément cette opinion, de nature trop rationaliste et intellectualiste: l’Art du Trait, symbolisé par l’Étoile Flamboyante, nous révèle combien il est facile pour l’humble artisan de trouver et d’utiliser le Nombre d’Or par une voie géométrique, sans même savoir ni lire ni écrire. Cela était à la portée de tous, même avant l’invention de l’algèbre.

October 31, 2023 — Ion Rajalescu