Qui sont les Shriners ?
Les Shriners. Pour beaucoup d’Européens, y compris francs-maçons, le nom de cet Ordre para-maçonnique n’évoque pas grand chose. Il en va tout autrement outre-Atlantique, où les Shriners sont bien connus et se signalent notamment par l’ampleur considérable de leurs actions caritatives. Mais d’où viennent les Shriners, quels sont leurs spécificités ? Dans quels pays les Shriners sont-ils implantés, et pourquoi ont-ils si peu d’impact en Europe ? C’est ce que nous allons découvrir dans cet article.
Origine et développement des Shriners
Longtemps connus comme l’Ancien Ordre Arabe des Nobles du Temple Mystique (Ancient Arabic Order of the Nobles Mystic Shrine), les Shriners furent fondés en 1872 à New York par deux francs-maçons américains, le médecin Walter Millard Fleming (1838-1913) et l’acteur et dramaturge William J. Florence (de son vrai nom William Jermyn Conlin, 1831-1891). Ils entendaient créer une nouvelle organisation maçonnique, basée sur le divertissement et la camaraderie, pour y accueillir les nombreux francs-maçons new-yorkais qui, dès 1870, avaient pris l’habitude de se réunir hors loge et de déjeuner au Knickerbocker Cottage, restaurant de Manhattan qui était depuis 1868 le siège du New York Athletic Club et que fréquentaient de nombreuses personnalités, notamment politiques.
Lors d’une tournée en Europe, Florence fut invité à Marseille à une soirée organisée par un diplomate Arabe. Une sorte de comédie musicale fut donnée, au terme de laquelle les invités furent reçus dans une société secrète. Fortement impressionné, Florence pris des notes et réalisa des dessins, dont Fleming se servit pour créer les rituels de ce qui allait devenir les Shriners.
Sur cette base, les Shriners adoptèrent donc un style arabisant et pseudo-musulman, tant dans les titres de leurs Officiers et les noms de leurs Chapitres que dans le décorum, les costumes et les symboles. Le premier Chapitre fut constitué le 26 septembre 1872 au Knickerbocker Cottage et prit le nom de Meccah (la Mecque en anglais). Il se fixa ensuite au nouveau Masonic Hall de Manhattan, inauguré en 1875. Le Grand Conseil Impérial, puissance suprême de l’Ordre, fut instauré en 1876, et Fleming en fut le premier Potentat Impérial. Le siège actuel de l’Ordre est actuellement à Tampa (Floride).
Le Knickerbocker Cottage
Les Shriners ne tardèrent pas à se répandre aux États-Unis et à se développer de manière très rapide. S’ils n’étaient que 43 en 1876, on dénombrait en 1878 treize Chapitres dans huit États, avec 425 membres en tout. Dix ans plus tard, il y avait 48 Chapitres aux États-Unis et au Canada, pour un total de 7210 membres. Et en 1900, on comptait pas moins de 55´000 Shriners répartis dans 82 Chapitres.
Phénomène exclusivement américain à l’origine, les Shriners sont devenus un Ordre International, s’implantant au Canada (1888), au Mexique (1907), à Panama (1918), à Porto Rico (2010), aux Philippines (2010), en Allemagne (2011), au Brésil (2015) et en Bolivie (2018). Tous pays confondus, les Shriners seraient environ 500’000 dans le monde.
Il faut aussi relever que de la franc-maçonnerie afro-américaine de Prince Hall s’est également mise à pratiquer le rite des Shriners au sein d’un Ordre rival fondé en 1893, l’Ancien Ordre Égyptien Arabe des Nobles du Temple Mystique (Ancient Egyptian Arabic Order of Nobles Mystic Shrine). S’engagea alors une querelle judiciaire, dont la branche afro-américaine sortit victorieuse en 1929, se voyant ainsi reconnaître le droit d’utiliser les rites des Shriners. Les Shriners afro-américains comptent aujourd’hui environ 35’000 membres, répartis en 227 Chapitres.
Enfin, une curieuse irruption de l’actualité mérite d’être mentionnée. Suite aux attentats du 11 septembre 2001, les Shriners firent l’objet de harcèlement, de menaces et même de tentatives d’attentats de la part d’extrémistes les prenant pour une organisation islamiste. Ils décidèrent alors d’atténuer l’aspect arabisant de l’Ordre et en changèrent le nom, pour prendre celui de "Shriners International".
Les spécificités des Shriners
Outre leur ambiance orientale, il faut relever deux spécificités des Shriners. La première est tombée en désuétude en 2000. Jusque là, les Shriners ne recrutaient que parmi les francs-maçons détenteurs du 32e degré du Rite Écossais Ancien Accepté ou ayant atteint le dernier degré du Rite d’York, Chevalier du Temple. Les Shriners ont donc longtemps constitué une sorte d’élite regroupant uniquement des francs-maçons de très haut grades. Mais en 2000, sans doute à cause d’une baisse du recrutement, cette exigence fut abandonnée, et désormais les simples Maîtres Maçons peuvent être reçus chez les Shriners.
Hôpital Shriner
Mais la spécificité la plus remarquable des Shriners est leur incroyable engagement caritatif, qui leur permet de financer des hôpitaux orthopédiques pour enfants offrant des soins gratuits. Les travaux de construction du premier hôpital furent lancés en 1922 et l’Ordre parraine maintenant 22 hôpitaux, ayant élargi ses activités aux soins pour les grands brûlés et à la recherche médicale. L’œuvre des Shriners représente sans doute l’exemple le plus spectaculaire de bienfaisance maçonnique que l’on puisse trouver dans le monde.
Les Shriners et les femmes
Les Shriners suivent strictement les principes de la franc-maçonnerie régulière et n’admettent que des hommes. Ces principes ne furent jamais remis en question, mais trois Ordres auxiliaires féminins furent créés pour accueillir les épouses, filles et parentes de Shriners.
Le Temple Oriental des Dames d’Amérique du Nord (Ladies Oriental Shrine of North America) fut fondé en 1903 à Wheeling (Virginie Occidentale) et compte aujourd’hui environ 8’000 membres, alors qu’il en comptait 32’000 au milieu des années 1990. Le recrutement s’est maintenant élargi et toute femme de plus 18 ans intéressée par les activités de l’Ordre peut y adhérer sans être de la parenté d’un Shriner ou d’un franc-maçon.
Les Filles du Nil (Daughters of the Nile) furent fondées à Seattle (État de Washington) en 1913. Elles comptent aujourd’hui environ 15’000 membres, qui n’ont plus besoin d’être apparentées à un Shriner ou à un franc-maçon, mais doivent avoir un lien avec les activités des Shriners. C’est ainsi qu’une femme ayant été, dans son enfance, patiente d’un hôpital des Shriners est éligible.
Et du côté afro-américain, les Filles d’Isis (Daughters of Isis) furent fondées en 1909, selon les mêmes principes que les deux autres ordres féminins. Elles comptaient 15´000 membres en 2003 et sont près de 10’000 aujourd’hui.
Pourquoi les Shriners sont-ils si peu représentés en Europe ?
Partie intégrante de l’univers maçonnique américain, les Shriners ne se sont implantés que dans neuf pays. L’Allemagne est le seul pays européen qui en compte et cela s’explique par la forte influence de la franc-maçonnerie américaine suite à l’occupation des Alliés au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Les Shriners sont caractéristiques du goût très prononcé qu’ont les Américains pour les ordres pseudo initiatiques, fantaisistes ou parodiques qui évoluent en marge de la franc-maçonnerie ou indépendamment d’elle. Il n’est pas jusqu’aux employés des wagons-lits ou aux plombiers-zingueurs qui ont leur propre ordre initiatique, avec rituel et serment de secret !
Cette forme de sociabilité, mêlant sentiment d’appartenance, références bibliques et simple amusement parle assez peu aux Européens, qui considèrent souvent ces organisations comme puériles et un peu ridicules. Il est peu probable que les Shriners aient beaucoup de succès en Europe, où l’on considère généralement les Ordres initiatiques comme quelque chose de très sérieux. Peut-être trop, parfois…
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